Nous reprenons la rédaction des biographies de chacun des anarchistes italiens dont le nom se trouve sur la liste "Libertá o Morte" du camp d’Argelès sur Mer, dressée par la police politique italienne le 8 août 1939. [1]
Cela s’inscrit dans le cadre de notre collaboration à la base de données sur le camp de concentration d’Argelès-sur-Mer, en cours de réalisation grâce à Grégory TUBAN, de Perpignan
Toutes les notices sont le fruit d’un travail de recherche en collaboration avec Tobia Imperato de Turin et Rolf Dupuy de Paris. La traduction et la rédaction sont réalisées par Jackie, giménologue.
Carlo ALDEGHERI [2]
est né le 22 février 1902 à Colognola-ai-Colli (VARESE), fils de Mosé et de Maria Scartossoni. Dans sa jeunesse il suit son père dans les travaux des champs, puis il exerce les métiers de maçon, peintre en bâtiment et cordonnier. Socialiste puis anarchiste, il subit la violence et les menaces des fascistes qui le contraignent à s’expatrier en France en 1922. Il se rend clandestinement à Antibes où il est aidé par un compatriote, Vittorio Perazzoni. Pour échapper aux recherches policières il endosse le faux nom de Carlo Peruzzi . [3] Il mène alors une activité antifasciste avec les anarchistes à Toulon et à Paris. En 1924, au cours d’une manifestation devant le Consulat italien de la capitale française, il est blessé d’un coup de feu tiré par des compatriotes fascistes. Une fois rétabli, il est temporairement incarcéré, sans chef d’accusation, et banni en tant « qu’élément subversif et dangereux pour l’ordre public ».
En 1932, il s’établit en Espagne à Sabadell dans la région de Barcelone, où il épouse Ana Canovas Navarro [4] , jeune ouvrière anarco-syndicaliste militante de la CNT (Confédération National du Travail). Ils ont une fille prénommée Primavera (Printemps) [5]. Aldegheri participe à la guerre civile, car « une nouvelle aurore est en train de naître dans ce pays » écrit-il à ses parents le 16 novembre 1936. Enrôlé dans la Milicia Alpina Sabadell avec le milanais Enrico Pedrazzini, il combat sur le Front d’Aragon où il est blessé.
Fait prisonnier par les phalangistes au cours de l’été 1937, il arrive à s’évader quelques jours après et à rejoindre sa compagnie.
Rentré en France avec sa famille en 1939, il est incorporé de force dans la Compagnie des travailleurs étrangers à Dunkerque. Arrêté par les Allemands lors de la bataille de Dunkerque, il est d’abord interné à l’hôpital militaire de Reims, transformé en camp. Il est ensuite envoyé dans le camp de concentration de Sagan (Wroclaw) à la frontière germano-polonaise, puis transféré à Argelès. Il y retrouve son ami d’enfance Mario Borsaro et adhère au groupe libertaire « Liberta o morte » crée par une centaine d’anarchistes. Il est ensuite extradé en Italie en 1941 où il se voit condamné à 5 ans de relégation et assigné à résidence à Ventotene. Il est ensuite transféré dans le camp de concentration de Renici et le 18 septembre 1943 il est blessé au bras par l’éclat d’une bombe et envoyé à l’hôpital d’Arezzo. Une fois guéri, alors qu’il doit retourner sur l’île de Ventotene il tente de s’enfuir mais se casse le coude en sautant d’un 2ème étage. Reconduit en cellule il profite d’un bombardement et des brèches faites dans la prison pour s’évader. Après avoir parcouru des centaines de kilomètres à pied, il arrive dans sa région natale.
Aldegheri participe à la Résistance en collaborant avec le CLN (Comité de Libération Nationale) de Vérone. Capturé par les « SS » il est déporté en Allemagne et ensuite transféré au camp de concentration de Bolzano où il retrouve des amis : Egidio Meneghetti, Giovani Faccioli et Berto Perotti. Il est libéré à la fin de la guerre. Retrouvant sa famille, il vit quelques années en Italie où il s’investit dans l’U.V.A.M (Union des Militants Antifascistes de Vérone).
En 1951 il s’établit définitivement au Brésil (rejoint peu après par sa femme et sa fille), et il ouvre un petit atelier de chaussures à Guarujà. Il mène une intense vie associative dans la région de San Paolo : orateur dans les pique-niques libertaires, il encourage et soutient les initiatives éditoriales anarchistes en langue portugaise. Il publie les livres d’éminents historiens lusitano-brésiliens comme Edgar Rodrigues, et réédite des pamphlets de vulgarisation comme la PreAnarquia-sugestöes Praticas Sobre a organizaçäo da sociedade Futura, de Randolfo Vella. Il contribue à l’acquisition d’une imprimerie et d’un terrain pour les besoins du mouvement libertaire local. Il reste en correspondance épistolaire avec des rescapés de la guerre d’Espagne, des fédérations et des groupes anarchistes d’Europe et d’Amérique.
Aldegheri meurt le 4 mai 1995 à Guarujà, petite ville où il a longtemps vécu, et où un Centre d’étude libertaire et bibliothèque porte son nom en 2010
Cf. document joint : Dall’Europa al Brasile
http://www.umanitanova.org/2018/03/25/dalleuropa-al-brasile/Dall’Europa al Brasile 25/03/2018)
Carlo & Anita Aldegheri : Vidas dedicadas ao anarquismo, Guarujá / São Paulo, Núcleo de Estudos Libertários “Carlo Aldegheri” / Centro de Cultura Social SP, 2017, 115 pp. + ill.
Due lunghe vite d’amore e d’anarchia, è il caso di dire, sono rievocate in questo bel volume dato alle stampe dagli attivissimi centri culturali libertari di Guarujá e San Paolo. Carlo Aldegheri, italiano (1902-1995) e Anita Canovas Navarro, spagnola (1906-2015) sono stati due militanti e combattenti dell’antifascismo internazionale in Europa, nel periodo tra le due guerre mondiali. Conosciutisi durante la guerra di Spagna, non si lasceranno più. In Brasile, dove si trasferiscono negli anni Cinquanta, partecipano e si fanno promotori di molte iniziative del movimento anarchico di quel paese, cui dedicano tutto il loro tempo e le loro risorse finanziarie. Carlo è morto a 93 anni ed Anita addirittura a 109 ! Le loro vite da esuli e migranti, straordinariamente vissute, attraversando il Novecento nelle lotte per l’emancipazione e per il riscatto umano e sociale, affrontando in armi il fascismo, subendo carcere e persecuzioni, dedicandosi anima e corpo agli ideali anarchici, sono ora ricostruite in questa importante pubblicazione. Il libro, in lingua portoghese, arricchito da un interessante apparato fotografico, è così strutturato : presentazione editoriale del Nucleo di Studi Libertari “C. Aldegheri” e del Centro di Cultura Sociale ; note biografiche sui protagonisti di Marcolino Jeremias ; “Carlo Aldegheri, uno dei pilastri della Colonna di Ferro”, saggio di Antonio Carlos de Oliveira ; “Senza patria, senza padrone”, saggio di Paulo Cesar Amaral ; intervista di Sonia Maria de Freitas (Museo dell’immigrazione).
Info e richieste alla Biblioteca “C. Aldegheri” di Guarujá nelca@riseup.net oppure al centro di Cultura Sociale di San Paolo ccssp@ccssp.com.br.
Giorgio Sacchetti