Nous reprenons la rédaction des biographies de chacun des anarchistes italiens dont le nom se trouve sur la liste « Libertá o Morte » du camp d’Argelès sur Mer, dressée par la police politique italienne le 8 août 1939.
Cela s’inscrit dans le cadre de notre collaboration à la base de données sur le camp de concentration d’Argelès-sur-Mer, réalisée par Grégory TUBAN, de Perpignan : http://www.memorial-argeles.eu/fr/
Toutes les notices sont le fruit d’un travail de recherche en collaboration avec Tobia Imperato de Turin et Rolf Dupuy de Paris. La traduction et la rédaction sont réalisées par Jackie, giménologue.
BENUSSI* Carlo
Carlo BENUSSI – fils de Stefano et Anna Smolle – est né le 25 octobre 1883 à Zara (Zadar), en Croatie. Il exerce les métiers de coursier et de coiffeur. Il s’établit en 1915 à Trieste où il milite avec des groupes anarchistes. Il est fiché au Casellario Politico Centrale CPC**.
En 1916 il se rend en Italie avec toute sa famille lors du déclenchement de la guerre*** , et il est interné en Sardaigne en raison de son activité politique. La guerre finie, il retourne à Trieste et continue son activité avec des organisations anarchistes. Renvoyé de son emploi de coursier de l’entreprise de tramway et surveillé par la police, il s’expatrie clandestinement en 1928 et s’établit en France. Il est expulsé en 1931 de France, puis d’Espagne et du Maroc. Expulsé en 1935 également de la Tunisie, il vit à Paris en semi clandestinité, en contact avec plusieurs représentants de l’émigration anarchiste italienne.
Il se rend en Espagne après l’éclatement de la guerre civile. En Catalogne, il est membre, entre autres, du Comité italien anarchiste de Barcelone, et il combat dans la colonne italienne.
En 1938, il rentre en France ; il est signalé à Marseille. En 1939 il est arrêté et interné au Camp d’Argelès sur Mer où il fait partie du groupe « Libertà o Morte ». Il est ensuite transféré au Camp de Gurs et probablement à celui du Vernet. Refoulé en Italie il est condamné en 1941 à cinq ans d’assignation à résidence à Ventotene. Libéré en août 1943 il rentre à Trieste. Là, faisant équipe avec Umberto Tommasini, il aurait pris contact avec le républicain Marc Marovaz, dirigeant de la résistance de la ville.
Fait prisonnier par les Allemands, il est déporté en Allemagne avec l’anarchiste de Trieste Adolfo Bidolfi. Il n’en reviendra pas. Déporté à Dachau le 23 juin 1944 sous le matricule 74502, classé dans la catégorie "Schutz" [ Schutz : Schutzhäftlinge, déporté pour motif de sécurité], il décède le 12 février 1945 ****.
Sources :
Marco PUPPINI, In Spagna per la libertà : antifascisti friulani, giuliani e istriani nella guerra civile spagnola, 1936/1939, Istituto friulano per la storia del movimento di liberazione, 1986, p. 322.
Pietro RAMELLA, Della despedida alla resitenza : il ritorno dei volontari antifascisti dalla guerra di Spagna e la loro partecipazione alla lotta di liberazione europea, Aracane, 2012, p. 214.
Notes
* Selon Valeria Morelli, auteur de I deportati italiani nei campi di sterminio, 1943-1945, édité en 1965, il s’appelait Carlo BENUSSU.
** CPC : Casellario politico Centrale : Le registre politique central créé en 1894 était un bureau de la Direction générale de la sécurité publique du Royaume d’Italie chargé de la mise à jour systématique du registre des « subversifs », mais également des oisifs et des vagabonds. Son activité fut amplifiée sous le fascisme avec la création de l’OVRA en 1930. Il sera maintenu sous la république italienne, et terminera ses activité dans les années 1960 : https://it.wikipedia.org/wiki/Casellario_politico_centrale
*** Le Royaume d’Italie déclare la guerre à l’Autriche et la Hongrie
**** Franco BERTOLUCCI, « Gli anarchici italiani deportati in Germania durante il secondo conflitto mondiale », dans Revista Anarchica, n°415, avril 2017, p.81 :
http://bibliotecaborghi.org/wp/wp-content/uploads/2015/12/dossier_anarchici-deportati.pdf