Causerie autour du 3ème volume des Chemins du communisme libertaire en Espagne juillet 1936-septembre 1937. (Nouveaux) Enseignements de la révolution espagnole
avec projection de photos le dimanche 11 août à 15 h30*
Avec cette trilogie** nous bouclons une longue immersion dans les méandres de l’anarchisme espagnol, commencée avant 2006 avec la publication des Souvenirs d’Antoine Gimenez (alias Bruno Salvadori).
Nous avons cheminé un bon moment avec les idées et pratiques constitutives de ce projet révolutionnaire hérité de la Commune de Paris, sur fond de guerre sociale très dure et quasi ininterrompue de 1835 à 1936.
L’Espagne fut le seul pays où sera maintenu et partiellement expérimenté en 1936-1937 l’abolition du travail salarié, le principal objectif radicalement anticapitaliste des XIXe-XXe siècles – laissé de côté par les marxistes ralliés à la social-démocratie.
« En Espagne, il y avait une grande masse qui voulait la révolution, et des minorités qualifiées de dirigeantes, parmi lesquelles nous-mêmes, qui non seulement […] n’ont pas rendu possible cet objectif, mais qui lui ont coupé les ailes de toutes les façons possibles. »
(Abad de Santillán, « Autour de nos objectifs libertaires », août 1938, Timón n°2).
Une grande partie de l’historiographie anarchiste et anarcho-syndicaliste a fait comme si la CNT-FAI avait soutenu de manière unitaire le processus révolutionnaire engagé après juillet 1936, notamment en Catalogne et en Aragon, que seules les conditions extérieures auraient limité puis étouffé : guerre, contre-révolutions bourgeoise et stalinienne.
En réalité en Catalogne les leaders de la CNT-FAI n’ont pas appelé à la mise en route du communisme libertaire. Faisant fit des desiderata d’une grande partie de la militancia et de la base, ils ont « collectivisé » le secteur productif sous l’égide de l’État non aboli, maintenu le salariat et incité la classe ouvrière à s’adapter à l’organisation scientifique du travail.
Simultanément, une autre partie de la militancia et de la base du mouvement s’engageait en Aragon – seule région d’Espagne sans État pendant près d’un an – dans la mise en application des fondamentaux du projet communiste libertaire conçu au sein de l’AIT anti-autoritaire, enrichi par Isaac Puente et acclamé au congrès de Saragosse en mai 1936.
Au-delà de la mise en évidence du comportement de certains destacados devenus des bureaucrates, nous avons relié les audaces et les autolimitations du mouvement anarchiste espagnol à la dynamique du capitalisme, aux étapes de son développement et à ses crises, pour les replacer dans le contexte de l’évolution de l’anticapitalisme du mouvement ouvrier en général. Ce dernier, il faut bien en convenir, a fini dans son ensemble par s’aligner sur une co-gestion travail/capital.
Nous mettons à disposition un matériau et des débats peu connus, peu traités ou oubliés et évités. Malgré l’insistance de certains militants et la qualité critique de travaux maintenant anciens (de Mercier-Vega, Peirats, Paz, Borrás, Floristan, Semprun-Maura, Mintz, Richards…), un bilan digne de ce nom sur la stratégie de collaboration avec l’Etat et la bourgeoisie républicaine adoptée par la CNT-FAI de juillet 36 à 1939 et sur ses conséquences n’a pas sufisamment été dressé par le mouvement lui-même***.
Nous procédons à une revisitation du tableau quelque peu figé de la « révolution espagnole de 1936 » à partir de la formule de Vernon Richards : « Jusqu’à quel point le mouvement révolutionnaire fut-il responsable de sa propre défaite ? » (1953).
Les giménologues 1er août 2019
Note * : Ce « centre documentaire antiautoritaire en milieu paysan » ou « Commune du Maquis » est établi sur le Hameau de Bois Bas, à 12 km du village de Minerve (34210), en pleine campagne. Voir le PDF ci-joint.
Note ** : Pour les volumes précédents cf.
http://gimenologues.org/spip.php?article717
et http://gimenologues.org/spip.php?article809
Note *** : « On rendra des comptes quand on reviendra en Espagne… », promettaient, depuis l’exil français, les principaux militants partisans de la collaboration libertaire redevenus « intransigeants », qui s’autodésignèrent de surcroît gardiens de « l’identité anarchiste ».