Bandeau
Les Gimenologues
Slogan du site
Descriptif du site
Treizième épisode. 31’58’’.
La mort de Durruti

Toujours avec un décalage chronologique, Gimenez nous raconte ici la suite et la fin de la bataille de Siétamo.

Treizième épisode : La mort de Durruti

Toujours avec un décalage chronologique, Gimenez nous raconte ici la suite et la fin de la bataille de Siétamo. De retour à Pina, il apprend avec retard l’entrée des ministres anarchistes au gouvernement central, et la mort de Durruti à Madrid.

La capitale, jugée perdue, est abandonnée par le personnel politique. Elle va néanmoins résister et Franco échouera dans son projet d’en finir rapidement avec la guerre.
Les circonstances de la mort de Durruti sont obscures. Il est arrivé à Madrid le 14 novembre avec une partie de sa colonne, totalisant 1400 hommes. Le 16, ils rejoignent les Brigades internationales déjà engagées sur le front. Les jours suivants se passent en terribles combats à la Cité universitaire, où les hommes de Durruti ne sont pas relevés. Le 18, ils sont décimés, et il ne reste plus que 400 combattants. Durruti se rend dans la zone de combat dans une voiture avec Manzana, le technico-militaire de sa colonne et plusieurs autres miliciens Dans des circonstances décrites différemment selon les témoignages, Durruti reçoit une balle et meurt le lendemain à l’hôpital. La thèse officielle anarchiste, s’appuyant sur le témoignage de Manzana dit qu’il a été tué par l’ennemi sur le front, alors que l’on sait que la balle mortelle a été tirée à moins de 50 cm. Plus tard, dans les années 1970, se feront face la thèse de l’accident provoqué par Durruti lui-même, qui est devenue la seconde thèse officielle du mouvement libertaire, et celle de la mort donnée, intentionnellement ou non, par Manzana.

Ricardo Sanz, est désigné le 20 novembre par la CNT pour prendre la succession de Durruti à Madrid, et surtout pour empêcher que les miliciens survivants écœurés et désespérés ne désertent leur poste. En Aragon le reste de la Colonne est en pleine effervescence : la plupart des combattants est persuadée que Durruti a été tué par les communistes, et veut le venger.
C’est ainsi que nous occupions nos loisirs entre deux tours de garde et les patrouilles.

Récit : du chapitre Attaque à la fin du chapitre Sariñena

Fin du récit :

Du fait des résistances qu’il suscite, le décret sur la militarisation ne sera pas mis en application en Aragon avant mars 37. Mais auparavant, une grave crise éclate entre l’organisation cénétiste et une partie de sa base.
Dans la colonne Durruti, où le moral est au plus bas, plusieurs Groupements des secteurs de Pina et de Gelsa, dont 76 membres du Groupe International, rédigent en janvier 1937 une affiche énonçant ce qui suit :
« Notre haute conception de la responsabilité s’avère incompatible avec la mentalité militaire qui, fatalement, débouchera sur une dictature (...) Nous acceptons la technique et la stratégie militaire, mais pas la militarisation ».

Le texte est suivi de propositions concrètes, dont un code militaire alternatif rédigé par les volontaires allemands. Mais la CNT reste inflexible et en plusieurs endroits du front, selon des témoignages, les unités qui refusent la militarisation se voient calomniées, taxées d’indiscipline, et leur ravitaillement coupé. En outre, les centuries déjà militarisées ne sont pas mieux armées que d’habitude, contrairement aux promesses faites, tandis que les brigades communistes et les Gardes d’Assaut en ville affichent leurs uniformes et fusils flambant neufs. Le 5 février à Valence, la Colonne de Fer convoque un plénum national des colonnes anarchistes en présence des dirigeants nationaux des comités de la CNT, de la FAI, et des Jeunesses libertaires. Des miliciens les critiquent durement, et leur renvoient notamment l’accusation d’indiscipline puisque les comités n’en font qu’à leur tête et ne consultent pas les combattants. Le ton monte et certains vont jusqu’à remettre en cause toute l’autorité des organismes nationaux de la CNT. Cette dernière ne veut toujours rien céder, et la militarisation finit par être acceptée.

Mais la crise à la base continue, et à Gelsa la résistance devient mutinerie, selon le rapport de Manzana présenté à la réunion de la CNT du 12 février à Barcelone. Certains responsables prennent en compte les protestations des combattants, mais d’autres proposent carrément d’aller réduire les mutins à coups de mitrailleuses ! Alors la réunion devient tendue : un chef de colonne se lève et s’exclame :
« Il faut quitter le gouvernement, ramener de gré ou de force nos ministres à Barcelone, et lancer un manifeste dénonçant ce gouvernement qui préfère livrer le peuple aux fascistes plutôt qu’à la vraie révolution ! »
Mais cet éclat n’eut pas de suite. Complètement isolée, la colonne de Fer se dissout le 21 mars, et beaucoup de miliciens quittent le front, rentrent à Valence ou à Barcelone, ou s’intègrent à la nouvelle 83e Brigade.

Dans la colonne Durruti 600 combattants démissionnent, dont 49 du Groupe International. Beaucoup d’Allemands et d’Italiens, qui ne peuvent rentrer dans leur pays, finissent par être intégrés, que cela leur plaise ou non, dans les Brigades internationales. Beaucoup partent aussi dans des écoles d’instruction militaire à Barcelone ou Albacete, comme Lorenzo Giua qui ne reviendra pas à Pina et s’enrôlera dans la brigade Garibaldi. Rares sont les miliciens qui comme Gimenez et ses copains les plus proches restent en Aragon comme francs-tireurs. Ce sera tout un art pour eux d’échapper à l’intégration dans les Brigades.
Quand la colonne Durruti devient la 26ème division, on peut considérer l’expérience du Groupe International comme quasiment terminée. Une Compagnie Internationale dite de choc de 120 hommes le remplace.

En avril 37, dans le secteur de Tardienta, au cours de la bataille de Santa Quiteria, la Compagnie se distingue par son grand courage et sa combativité, selon la langue de bois des propagandistes de la CNT. En fait elle a perdu 50 % de ses hommes car l’infanterie anarchiste n’a pas été soutenue, comme prévu, par l’aviation aux mains des communistes... Ce sabotage va provoquer de nouvelles désertions de miliciens au grand dam du Comité Régional de la CNT de Barcelone.

Gimenez est envoyé par Pablo Vagliasindi à Barcelone parce que la Compagnie doit être réorganisée, mais aussi pour recruter des combattants à cause de cette hécatombe.