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Notice biographique de Bruno Salvadori alias Antoine Gimenez

Eléments essentiels de la vie de notre héros, de sa naissance en Italie à sa mort à Marseille. Cette notice est dite "provisoire" car elle peut être modifiée par la découverte de nouvelles précisions.

NOTICE PROVISOIRE DE BRUNO SALVADORI
ALIAS ANTONIO GIMENEZ

Bruno Salvadori est né le 14 décembre 1910 à Chianni, province de Pise en Italie, de Giuseppe et de Anna Montagnani. [1]

Chianni ; (Pise)

Son père travaillait dans les travaux publics (Ponts et Chaussées). Soldat lors de la guerre de 14-18, il est sans doute décédé à Lyon, sans qu’Antonio ait cherché à le revoir semble-t-il.
Bruno avait deux sœurs qu’il appelle Brunetta et Lucienne dans sa correspondance. Brunetta avait une fille et les deux sœurs semblaient vivre en France en 1952 depuis un certain nombre d’années.

À 9 ans (1919) il habite Livourne (Livorno) avec sa mère et ses sœurs. Son père travaille près de San Dona Di Piave, province de Venise, aux reconstructions d’après-guerre. Ils l’y rejoignent pour les vacances.

C’est vers l’âge de 12/13 ans (1922/23) qu’il fait la connaissance des Anarchistes de Livourne lors d’échauffourées avec les Chemises Noires. Il rencontrera brièvement Malatesta, et s’initiera aux idées libertaires.
Il perdra sa mère, décédée d’une maladie du foie, à une date inconnue (d’après un passage du manuscrit -Perdiguera-, elle serait morte vers 1928) à la fin de son adolescence. Ce sera un profond traumatisme pour lui.
Il réside à Marseille, où il a émigré au tout début des années 1930. Il est expulsé de France une première fois le 7 octobre 1930.
Il sera rapatrié pour répondre à ses devoirs militaires dans la Division de Mantoue (Mantova). Il est titulaire d’un passeport émis le 1er septembre 1933 pour la France, d’une durée d’un an, pour cause de convalescence (?) lors de son Service Militaire.

C’est lors de ses séjours à Marseille qu’il fera la connaissance de Jo et Fred, avec qui il entamera une petite carrière de « monte en l’air ».
Il mènera une vie de « Chemineau-trimardeur » jusqu’à ses tentatives d’entrée en Espagne ; ceci est à relier avec ses déclarations selon lesquelles il fut aussi contrebandier et passeur de publications et brochures.
Il est arrêté le 22/12/34 à Perpignan pour violences et voies de fait et condamné le 26/12/34 à 4 mois de prison. Il est arrêté de nouveau au Boulou le 03/08/35 et condamné à 6 mois de prison par le Tribunal de Ceret le 22/08/35, pour infraction au décret d’expulsion.
Selon la police italienne qui le suit de près, il se déclare alors déserteur et antifasciste. Selon le Tribunal de Perpignan, il a huit condamnations à son actif à ce moment.
Auparavant il a été aussi arrêté le 25/05/1935 à Barcelone alors qu’il tentait de monnayer son passeport, ce qui entraînera une ouverture de dossier par la police politique mussolinienne, en tant qu’élément subversif.
Expulsé d’Espagne vers le Portugal le 13/06/1935 par Valencia de Alcantara, il aura entre-temps fréquenté les milieux subversifs de Barcelone.
Il est arrêté de nouveau le 22 /02/1936 et se retrouve incarcéré à la prison Modelo de Barcelone. Il entre alors en relation épistolaire avec Pasotti de Perpignan qui organise un réseau efficace de passage d’hommes et de propagande, et de soutien des militants emprisonnés en Espagne.
Ayant terminé sa peine, il sera expulsé vers la France par Puigcerda.

Bruno Salvadori : mai 35

C’est à partir de cette période qu’apparaît le personnage d’Antonio Gimenez, et que la police italienne perd définitivement sa trace sous son ancienne identité. Gimenez se trouve à Alcarràs, près de Lérida, à la veille du pronunciamiento. Il travaille avec des copains sur la propriété agricole de Vallmanya. Il possède une carte de la CNT à ce nom. C’est à Alcarràs qu’il va croiser la route de Josep Llados,17 ans, un futur milicien qui se souvient de lui sous le nom de Tony.

Josep Llados.1936.

« Je me souviens très bien de Tony, nom pas très courant dans la région. Il n’était pas du village. Je ne savais pas d’où il venait. Il avait des amis de son âge dont je ne faisais pas partie. Il était petit, pas très costaud et parlait plus ou moins catalan. Il faisait figure d’intellectuel par rapport aux autres et parlait peu. C’était ce qu’on appellerait aujourd’hui un marginal. Un jour, il a disparu, certainement lors des événements de juillet 36. »

Gimenez intègre ensuite la Colonne Durruti puis le Groupe International qui se constitue à Pina de Ebro. Il prend part notamment aux batailles de Sietamo, Farlete et Perdiguera. Par recoupement, il semble qu’il fut Délégué de Groupe avant la militarisation. On a retrouvé une carte d’identité (non signée par l’intéressé) de l’AMRE (Agrupacion Militar de la Republica Espanola) émise à Toulouse en avril 1945, lui attribuant le grade de lieutenant d’infanterie.
Il fera la connaissance d’Antonia Mateo-Clavel et de sa fille Pilar à Peñalba, province de Huesca, qui deviendront sa femme et sa fille.

Démobilisé en 1938 comme les autres volontaires étrangers, il habitera un temps à Barcelone puis à Montcada i Reixac. Il travaillera à Barcelone jusqu’à la retirada. Il quitte l’Espagne par Port-Bou le 9/02/1939.Il est recensé par le Ministère de l’Intérieur Italien en août 1939 sous le nom de Gimene Antonio (sans que le rapport soit fait avec Salvadori), dans le camp de concentration d’Argelès sur Mer, comme faisant partie du groupe de militants libertaires Libertà o Morte. Au sein de ce groupe s’organisait la survie et la défense collective face à tous les dangers encourus : malnutrition, hostilité des communistes, mauvais traitements. Ils allèrent jusqu’à provoquer la mort par grenade d’un gardien sénégalais, en mesure de représailles.

1939-1944 : Intégré dans Compagnies de Travailleurs Étrangers comme tant d’autres réfugiés, Antoine travaille un temps sur le Mur de l’Atlantique, dans le secteur de Royan, où il participe à des sabotages et à des actions de la Résistance.
Il semble qu’il ait ensuite travaillé comme bûcheron sur les bords de la Vézère. C’est à ce moment qu’il apprend la mort de son ami du GI l’Allemand Otto (que nous aimerions bien identifier) dans la résistance du côté de Limoges (on espére retrouver la trace de ce fait dans les journaux de l’époque).

Antoine et sa famille sont domiciliés à Uzerche, comme l’atteste un Ausweiss daté de 1944. Antoine sera libéré des Compagnies de Travailleurs Étrangers le 26 octobre 1944. Suit quelques années de flou dans la biographie. Notre italien travaille ensuite au chantier du barrage de Treignac en Corrèze qui commence en 1948. La famille habitera Limoges au moins de 1948 à 1951. Le choix lui sera donné ensuite d’aller vivre à Paris ou à Marseille. Antoine ayant une proposition d’emploi dans le Bâtiment, c’est Marseille qui sera choisie.

Antonio sera embauché par la Société des Travaux du Midi le 2/03/1953 en tant que Boiseur-coffreur. Il y travaillera jusqu’à sa retraite anticipée pour cause de maladie (problèmes de dos). Il n’est jamais retourné en Italie. Il ne semble pas qu’il ait rejoint une quelconque organisation politique pendant toutes les années qui ont suivi la fin de la guerre. Amateur de littérature, il écrira nouvelles et poèmes mêlant autobiographie et fiction.

Il rédigera les Souvenirs ... entre 1974 et 1976 sans se documenter sur cette période, se fiant à ses seuls souvenirs. Ce choix provoquera quelques erreurs et approximations dans son récit, mais c’était le prix à payer pour une oeuvre sincère ne cherchant pas à faire cadrer ses sentiments avec l’Histoire écrite . Il chercha à les faire éditer, sans succès, y compris dans le milieu libertaire auquel les « souvenirs sensuels » semblaient déplaire....
De tous ses écrits se dégagent les traits marquants de sa personnalité :
Un amour sans borne pour les femmes trouve son origine dans son enfance. Il a grandi entouré de femmes en grande partie à cause de la Guerre de 14 et du métier de son père. Antonio ne parlait d’ailleurs jamais de son géniteur .

Personnage désintéressé, il vivra souvent au jour le jour sans porter grande attention aux questions matérielles ;
Il nous entretient en permanence de son rapport aux Autres sans frime ni autosatisfaction, y compris au cours des scènes intimes. Tout acte y est relatif à autrui, toute pensée s’y réfère, dans le combat comme dans l’amour. Il n’était certes pas parfait mais profondément humain.

La rue Fontaine de Caylus.

En 1976, répondant à la curiosité politique de Viviane, sa petite-fille, il reprend contact avec le mouvement libertaire en fréquentant le groupe de Marseille de la Fédération Anarchiste alors situé au 72 du Bd Eugène Pierre. Il assurera nombre de permanences au fil desquelles son rôle modeste de référence historique et d’élément modérateur s’accentuera . Le groupe F.A. déménagera un peu plus tard dans un local au 3 rue Fontaine de Caylus, dans le quartier du Panier, au pied de l’immeuble où la famille Gimenez possédait un modeste appartement.

Antoine, vers 70 ans.

Tout le monde l’appelait Antoine. Il mourra d’un cancer le 26 décembre 1982, très entouré de tous les copains gravitant autour du groupe. Son décès est enregistré à l’état civil sous sa fausse identité, qu’il doit sans doute à Pasotti.

Nous avons des photos de sa mère et d’Antonio/Bruno à diverses époques. Bien d’autres documents ont été retrouvés : papiers administratifs français, poèmes et textes écrits par lui, et une cassette audio où pendant 10 minutes, Antonio/Bruno parle de sa rencontre avec la Madre à Pina.

le 1er novembre 2004.